L’emprise – Que sais-je, 5 avril 2023

L’emprise – Que sais-je, 5 avril 2023

Le 5 avril 2023 est sorti en librairie mon dernier essai, L’emprise, aux éditions Que sais-je ?

En voici un extrait :
 » L’emprise est à la fois un abus de confiance, une manipulation, un harcèlement et une maltraitance. C’est insuffisant, car ce serait oublier la domination (psychologique, physique, relationnelle, affective, sexuelle et économique), la réification et l’infantilisation de la victime. Et c’est encore oublier que cette relation est mortifère et parfois mortelle. La violence psychologique est étroitement intriquée dans l’emprise, mais elle désigne un ensemble d’agissements nocifs alors que l’emprise désigne la relation dans laquelle cette violence est exercée. Elle en est le cadre. Elle est omniprésente, invisible et liberticide.

L’emprise est un système relationnel allant au-delà de l’ascendant intellectuel ou moral, car tout ascendant n’est pas destructeur. L’emprise colonise l’individu jusqu’à sa perte d’identité et parfois sa mort. L’identité est une unicité reconnue (nommée), légitimée, qui possède une continuité et une permanence. Dans cette identité apparaît une union entre l’esprit et le corps, comme Spinoza l’entendait dans l’Éthique : « L’objet de l’idée constituant l’esprit humain est le corps, autrement dit une manière de l’étendue précise et existant en acte[1]. » En suivant un raisonnement spinoziste, on peut imaginer que le salut vient (entre autres) par le corps, pouvant de la sorte « se concevoir de façon adéquate lui-même, ainsi que toutes les choses qui peuvent tomber sous son intelligence[2] ».

L’emprise brise l’unité corps-esprit par la dissolution du lien entre émotions et raison. C’est l’un des aspects de la dissociation, cette rupture de l’unité psychique, causant « une perturbation touchant les fonctions qui sont normalement intégrées comme la conscience, la mémoire, l’identité ou la perception de l’environnement[3] ». Les victimes le disent : « J’étais là sans être là, comme si je volais au-dessus de la pièce. Je voyais tout, je comprenais, mais je ne ressentais plus rien. »

L’emprise, usant de la violence sous plusieurs formes pour établir un ordre nouveau et supprimer l’existant, est un terrorisme psychique et physique visant un individu ou un groupe d’individus avec intention de le soumettre, de le contrôler et, si nécessaire, de le détruire. La personne sous emprise va vivre dans la terreur, « essence même de cette forme de régime » selon H. Arendt[4].

Reste à distinguer l’emprise mentale de l’emprise morale. La première est organisée par un gourou, chef de groupement, enseignant, etc. dont les comportements amènent à la dépendance, la sujétion, l’infantilisation. L’endoctrinement provoque l’obéissance totale. L’adepte (élève, croyant…) voit en ce chef un maître, un « presque » dieu et lui prête des capacités et pouvoirs liés au surnaturel et au magique. L’emprise morale, qui repose également sur la sujétion, est perverse. Elle sous-entend un dévoiement du lien, une instrumentalisation des sentiments, une insécurité psychique et physique. C’est principalement dans le cadre familial et conjugal que nous la retrouverons. Mais, comme nous le verrons, ce cadre particulier offre d’autres ressorts à la violence. »


L’objet du livre est de parler du mécanisme de l’emprise, de son système, de l’interaction verticale et univoque dominant – dominé qu’elle instaure, des conséquences pour les victimes enfants et adultes. Il s’agit donc de comprendre et d’identifier toutes les relations d’emprise quel que soit le contexte, qui fonctionnent toujours de manière assez similaire à l’emprise sectaire, s’attaquant à la pensée, à la liberté physique, à l’expression des émotions, à la sexualité, à l’argent, à la spiritualité, à l’ordre politique et moral.
Mais comme, indéniablement, l’emprise conjugale et familiale bénéficie du huis-clos, du secret, du doute des proches et / ou des professionnels, elle est plus spécifiquement étudiée dans cet essai. À ce titre, il y est question de contrôle coercitif et de continuum des violences [5] , allant jusqu’au feminicide.


[1] B. Spinoza, Éthique, II, proposition 13, trad. B. Pautrat, Paris, Seuil, 1998.

[2] B. Spinoza, Éthique, IV, appendice 4, trad. B. Pautrat, Paris, Seuil, 1998.

[3] Selon le DSM-5.

[4] H. Arendt, Les Origines du totalitarisme, 1951.

[5] À ce sujet, vois les travaux de Gwénola Sueur et Pierre-Guillaume Prigent : https://reseauiml.wordpress.com/2020/06/23/quest-ce-que-le-controle-coercitif/

Parlons violence psychologique dans le couple

Ce matin, 21 mars 2023, j’étais invitée par Julie Laurent-Marotte pour parler des violences psychologiques dans le couple.
Un live d’une heure trente, pendant lequel nous avons parlé manipulation, harcèlement, plainte, violence machiste, violence maternelle, justice, accompagnements…
Un moment très riche, une discussion ouverte. Avec beaucoup d’émotions par moments.

Vous pouvez voir ou revoir ce moment ici (oui, là, juste en dessous), ou encore sur Instagram, sur mon compte ou sur celui de Julie .

On m’a fait remarquer après ce live que j’ai l’air fatigué. Et c’est vrai, je suis fatiguée. Mais pas découragée, bien au contraire. Continuer d’écouter, continuer d’écrire, continuer de parler, continuer de recevoir la parole.
Et de nouveaux projets, pour prolonger ces actions, à venir, que je préciserai bientôt.

Et je constate que ça fait maintenant… 7 mois que je n’ai rien posté ici. 7 mois, c’est long, mais 7 mois pendant lesquels je vous ai préparé un nouveau livre, L’emprise, qui sortira aux éditions Que sais-je le 5 avril prochain.

Êtes-vous l’ex toxique de votre ex toxique ?

Voici la question qui fait mal ; et à laquelle nous essayons de répondre dans ce podcast.
Invitée par Judith Duportail, Coco Spina et Samuel Dock au micro de leur podcast Self-care ta mère, nous nous interrogeons sur notre possible toxicité, sur notre part de responsabilité, sur notre engagement ou désengagement dans nos relations.
Sur nous.
Nos comportements.
Nos schémas de pensées, et nos biais cognitifs.

Un podcast qui remue, qui bouge, qui déménage et dérange. Parce que prendre conscience de qui l’on est et de comment l’on agit peut être dérangeant… mais ô combien nécessaire !

Et en complément, mon livre paru aux éditions de l’Observatoire, Tous toxiques, tous victimes

Deux podcast à découvrir

Deux podcast à découvrir

Cette semaine, j’interviens dans deux émissions / podcast, que je vous invite à découvrir.

Le premier est L’Ire du dire. J’y suis invitée par Carole Carcillo Mesrobian, pour présenter mon livre Tous toxiques, tous victimes ? et parler de harcèlement, de violences, de toxicité, de narcissisme, de violences intrafamiliales, mais également de notre société, victimaire, pressée, où la frustration est impossible, le manque n’existe pas et ne doit pas exister, l’urgence et la demande permanentes. Un besoin de discernement, d’élaboration, d’esprit critique, de sens se fait de plus en plus sentir. C’est ce sur quoi nous échangeons Carole et moi, sans oublier la nécessité de considérer (enfin) les enfants et leurs droits, et la place du féminisme actuel.

Le deuxième podcast est Coclito, réalisé et animé par Caroline Facy.
Un podcast qui réveille la sexualité en l’amenant vers la poésie et l’esthétique.
Nous y parlons bien sûr sexualité, féminité, féminisme, relations à l’autre et relations à soi, toxicité et violences, construction individuelle et construction des relations, amour et amitié, enfance, renoncement et acceptation. Je m’y livre aussi, un peu…

Un peu de moi, beaucoup de vous, pour vous, à écouter ou ré-écouter dans ces deux podcasts. Toujours le même plaisir à partager, à parfois essayer de dénoncer, faire avancer, bouger, comprendre, mettre en lumière des situations, des relations, des comportements qui nous touchent, nous heurtent ou nous élèvent.

L’amitié

Le 7 avril 2022 sortira en librairie mon dernier essai : L’amitié.
Essentielle, constructive, fusionnelle ou toxique… Quelle part de nous se joue dans ce lien puissant ?

L’amitié nous est fondamentale. Et comme l’amour, elle reste souvent inexpliquée. Pourquoi sommes -nous « amis », de qui sommes-nous amis et qu’en attendons-nous ? Existe-t’il un moment privilégié, des circonstances particulières pour devenir amis, ou est-ce le fait de la chance ou du hasard, de la maturité ou de la nécessité ?
Comment réagissons-nous lorsque nous sommes blessés, en amitié ? Comment supportons-nous une rupture d’amitié, ou la perte d’un.e ami.e ?

La crise sanitaire nous a montré à quel point cette relation peut-être forte, indispensable, fragile aussi lors d’un éloignement, incertaine ou indestructible, évolutive, stabilisante, rassurante, fondatrice. Les études, les recherches, les questionnements sur l’amitié ne datent pas de 2020, loin s’en faut. Mais depuis la crise sanitaire, jamais ils n’ont été aussi nombreux, nous renvoyant à nos peurs et nos angoisses existentielles : la solitude, la finitude, le sens que nous donnons à nos actions et nos émotions.

Après trois essais parus chez Eyrolles (Les mères qui blessent, Les prisons familiales, Les séparations qui nous font grandir) et un vaste questionnement sur la toxicité des relations, les violences psychologiques et l’emprise (Victimes de violences psychologiques, Le Passeur éditeur ; Au secours je vais bien , Idéo et Tous toxiques, tous victimes, L’Observatoire), je me suis penchée sur cette question de l’amitié. Comment naît-elle et comment se construit-elle ? Que dit-elle de nous, que dit-elle de notre lien aux autres et de la place que nous nous accordons ? Ce lien qui nous permet d’exister au monde, de nous développer et de nous élever, mérite bien des soins et des attentions. Il est cette part de nous forte et fragile, sensible et durable, inextinguible, qui nous permet d’être.

À l’occasion de la sortie de ce livre le 7 avril, une soirée de lancement est prévue, le jeudi 7 avril, à 19h, à la librairie Les libres champs, 18 rue Le Verrier 75006 Paris.
Je serai heureuse de vous y retrouver.

L’amitié, Éditions Eyrolles, sortie le 7 avril 2022