« Je suis désolée, on peut décaler, je me sens mal depuis ce matin… »
« Bonjour, excusez-moi, j’ai complètement oublier notre rendez-vous. Je vous rappelle pour en prendre un autre. »
» Cette fois, je confirme et je viens, pas comme la dernière fois… »
» Je suis bloquée dans le métro depuis une heure. C’est pas de ma faute, c’est les transports. »
» J’ai eu une panne. Ma voiture ne voulait pas démarrer. Bon, en même temps, on peut se voir à un autre moment… »
Bon, « en même temps », démarrer un accompagnement, une thérapie, n’est jamais facile. Surtout quand on souffre d’un manque de confiance en soi important. Particulièrement lorsque l’on a été mis à mal, abîmé, détruit, par un comportement ou une personnalité toxique.
Il faut bousculer des croyances et des ancrages. Il faut se confier, parler, dire. Avec la peur de ne pas être compris(e) ou d’être jugé(e).
« J’hésite toujours à sortir de chez moi. Je ne vais jamais faire mes courses si je risque de croiser du monde. »
La phobie et l’anxiété sociale sont une des causes de cet empêchement. L’angoisse à se retrouver confrontée au regard des autres, regard ressenti comme un jugement, et un jugement forcément négatif.
La personne souffrant d’un manque de confiance en soi est presque rendue incapable d’imaginer, de concevoir que les autres puissent être bienveillants. Même l’absence de regard n’est pas comprise. Elle ne peut pas être indifférence. Elle ne peut pas être due au fait que l’autre soit pris dans ses propres pensées. Si l’autre ne vous voit pas, c’est que vous n’avez pas d’intérêt. Voilà un des ressentis de ces personnes souffrant d’anxiété sociale.
Quant aux victimes de personnalité ou de comportements toxiques, elles ont peur d’être vues, entendues, regardées. Elles ont peur d’un passé souvent très présent, d’un vécu, d’une histoire à raconter. Elles n’arrivent jamais seules : elles viennent avec leurs fantômes. Elles prennent rendez-vous pour elles… et pour ces fantômes qui ne cessent de les hanter.
Ce n’est pas le premier rendez-vous qui est forcément le plus difficile. Celui où le blocage se manifeste peut être après 5, 10 séances… On ne sait pas. Et le blocage peut aussi ne jamais se présenter. Chaque cas est particulier, comme chaque personne est particulière. Il est aussi impossible que dangereux de leur coller un calque, un modèle. La première nécessité, en thérapie et en accompagnement, est l’écoute et la compréhension du patient. Il faut être patient à son tour…
Ces impossibilités à venir à un rendez-vous, ces actes manqués « Excusez-moi, j’ai complètement oublié… », ces rendez-vous décalés, annulés, reportés, doivent être pris en compte. Et compris. Sans les disséquer éternellement, je me pose la question, et la pose à celui ou celle que je reçois : « Comment vous êtes vous senti(e) en devant annuler / décaler, en oubliant ce rendez-vous ? S’est-il produit quelque chose de particulier avant le rendez-vous manqué ? »
Je leur demande aussi si cette annulation peut avoir un lien avec moi. Je suis thérapeute ET humaine. J’ai pu avoir un comportement qui a heurté.
« Non, ce n’est pas vous. C’est moi, et j’ai honte. »
Honte de quoi ?
Le mot est lâché.
Le manque de confiance en soi provoque la honte.
La honte de ne pas faire. De ne pas dire. La honte de se sentir petit devant les autres. Parfois inexistant. Habituée à ce sentiment d’inexistence, la personne qui veut en sortir déploie des efforts prodigieux. Parfois, elle a des périodes de rechute. Faut-il juger pour autant ? Non. Il faut le prendre comme un signe. Et l’encourager à continuer ses efforts. Et à continuer l’accompagnement mis en place.